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La création de la paroisse de Bonnevoie en 1897

125 ans de vie paroissiale à Bonnevoie (septembre 2022)

En cette année 2022, nous célébrons le 125ième anniversaire de la reconnaissance de la paroisse de Bonnevoie par les instances de l’État et de l’Église comme paroisse indépendante. En effet, il y a exactement 125 ans, le Grand-Duc Adolphe signa la loi du 26 mars 1897, faisant de Bonnevoie une paroisse à part. Que cette date importante dans l’histoire de notre localité soit prétexte à s’interroger sur l’évolution historique de la paroisse de Bonnevoie.
Après la fondation de l’abbaye des cisterciennes « Notre Dame de Bonnevoie » qui, d’après l’acte de ratification du 26 février 1234, fut reconnue par le pape Grégoire IX, les rares habitants de Bonnevoie étaient autorisés, pendant près de six siècles, à assister dans l’église abbatiale aux services religieux communs et solennels. Le dimanche et les jours fériés, ils fréquentaient parallèlement l’église de la paroisse Saint Pierre et Paul de Hollerich, dont Bonnevoie faisait notoirement partie depuis 1542, et l’église Saint Ulric située au Grund. L’église abbatiale se trouvait à environ 40 mètres du portail du cloître construit en 1636, à droite de l’actuelle rue portant le nom de « Cour du Couvent » entre les numéros 119 et 121 de la rue de Bonnevoie. Après deux siècles d’aisance et de prospérité commençait une période difficile : saisies, pillages, longues guerres et trois incinérations (1427,1542,1558) endettaient le couvent. Pourtant, après chaque incendie il était peu à peu reconstruit en partie. Quand, en 1794, les Français assiégeaient la citadelle de Luxembourg, le couvent, y compris l’église abbatiale, brûlait une quatrième fois et dans la suite, les religieuses étaient obligées de dissoudre la communauté monastique. En 1797 les biens du couvent étaient vendus aux enchères comme propriété nationale française. Après cet effondrement et la dissolution du couvent, il n’y avait plus, à partir de 1794, ni lieu de culte ni ecclésiastiques à Bonnevoie. Pendant quatre-vingt-dix années, les habitants devaient accomplir leurs devoirs religieux à Hollerich, comme depuis des siècles.
Avec la construction de la ganterie dans les écuries du cloître rénovées en profondeur en 1838, d’une part, et avec l’aménagement de la gare centrale de Luxembourg en 1858, à la limite ouest du territoire de Bonnevoie, d’autre part, notre localité connut un développement fulgurant. De 206 en 1806, le nombre d’habitants était monté en 1873 à 1100. De ce fait, le désir d’avoir une église devenait de plus en plus important et pressant. En même temps, les habitants de la localité revendiquaient que Bonnevoie devienne une paroisse indépendante de Hollerich, comme la localité voisine de Hamm avait été séparée de la paroisse de Sandweiler et reconnue comme paroisse indépendante, à une époque où la localité de Hamm faisait encore partie de la commune de Sandweiler.
Du côté de l’Église, l’évêque diocésain est l’instance responsable de la mise en place d’une nouvelle paroisse. Selon les termes du concordat de 1801 entre le Pape Pie VII et Napoléon Bonaparte et les articles y annexés, la fondation d’une paroisse indépendante, qui va de pair avec l’existence d’une église pour les services religieux, d’un presbytère et du consentement d’un traitement pour le curé et, le cas échéant, pour un ou plusieurs vicaires, exige la promulgation d’une loi par l’État.
En 1873, quand la construction de la nouvelle église de Hollerich touchait à sa fin, Mathias Molitor le curé nouvellement nommé prenait les premières initiatives énergiques pour soutenir les revendications religieuses de sa filiale de Bonnevoie. Il fondait d’abord un comité de construction, remplacé en 1881 par le Conseil paroissial, ayant pour but de rassembler les fonds pour la construction d’une église à Bonnevoie.
Différentes circonstances empêchaient pourtant une réalisation rapide du projet. D’une part, suite à de graves difficultés financières, la section budgétaire de Hollerich ne se voyait pas en mesure de prendre à son compte, ne serait-ce qu’une partie des dépenses nécessaires à la construction envisagée de l’église. Il est connu qu’à l’époque notre localité était partie de la commune de Hollerich et constituait une section avec Hollerich. D’autre part, au vu de la pauvreté des habitants de l’endroit, pour la plupart des ouvriers et des employés modestes, il ne fallait pas s’attendre à des contributions importantes. 102 familles prenaient pourtant l’engagement de verser une contribution hebdomadaire de 25 centimes. Par ailleurs, le conseil communal de Hollerich contestait l’urgence de l’initiative. En outre, deux requêtes adressées à la Chambre des Députés en 1877 et en 1881, en vue de l’octroi d’un subside d’État, ont été refusées avec l’argumentation qu’un subside d´État ne pourrait être accordé qu’à condition que le principe de la construction d’une église dans la localité de Bonnevoie soit retenu par les autorités compétentes ou que la construction soit garantie par les moyens financiers du
Conseil paroissial. Sur proposition du curé Molitor, le gouvernement transférait, le 02 février 1881, le traitement d’un vicaire attaché à l’église de Bigonville à l ‘église de Hollerich pour rendre possible l’engagement d’un vicaire à Bonnevoie. En outre, le conseil communal de Hollerich accordait une indemnité de logement au vicaire, parce que la commune était dans l’impossibilité de mettre à disposition un logement.
En l’an 1882, le curé Molitor prenait contact avec Auguste Charles et Adolf Omlor, propriétaire principal respectivement directeur de la fabrique de gants, afin de trouver une solution provisoire à la construction d’un lieu de culte à Bonnevoie. Dans les bâtiments et aux frais de la fabrique, on construisait une chapelle de secours permettant de célébrer des services religieux. La chapelle fut érigée à l’endroit de l’actuelle maison numéro 105 de la rue de Bonnevoie et disposait d’une superficie de 84 mètres carrés. Le lundi de la kermesse, le 13 novembre de la même année, après une parenthèse de quelque 90 années depuis la destruction de l’église abbatiale, on pouvait de nouveau célébrer des services religieux dans notre localité. Sur un autre point l’administration communale de Hollerich donnait satisfaction à la population en aménageant un cimetière qui fut consacré en 1882. De la sorte, une vie religieuse indépendante pouvait peu à peu se développer à Bonnevoie, même si la localité continuait à faire partie de la paroisse de Hollerich. En décembre 1883, cette évolution fut confirmée par les instances religieuses par la nomination d’un vicaire qui s’installait à Bonnevoie.
Parce que l’indécision des autorités étatiques et communales faisait traîner en longueur la réalisation de la construction de l’église, le Conseil paroissial décidait le 12 mars 1886 de prendre lui-même en mains la construction. Une semaine plus tard, le curé Molitor s’adressait au moyen d’une brochure à tous les dignitaires de l’Église, aux congrégations comme à tous les concitoyens bien situés de notre pays en leur demandant de soutenir la construction d’une église à Bonnevoie.
Par acte de donation notarié daté du 13 juillet 1887, deux familles de Bonnevoie, Henri Berchem et Pierre Besch-Thill, mettaient à disposition deux parcelles de leurs propriétés privées pour la construction de l’église. La première phase des travaux – grande nef et nef latérale – de la nouvelle église fut immédiatement entamée. Dès le 12 août 1888, Bernard Haal, chanoine et doyen de la ville, pouvait bénir l’église à demi terminée et la mettre à disposition pour le service religieux. En 1894, le bâtiment, y compris tout le mobilier, fut donné en cadeau, sans dettes, à la commune de Hollerich. La même année encore, la commune faisait construire le chœur, la sacristie et la tour de la nouvelle église.
En 1895, Henri Berchem vendait à l’administration communale de Hollerich une parcelle de terrain située à côté de la nouvelle église au prix de 3 francs le mètre carré, pour construire le presbytère. La maison était construite en été 1896 selon les plans de l’architecte Leo Sutter. Parce que l’autorisation des plans se faisait attendre, et qu’on faisait dépendre la fondation de la paroisse de l’achèvement du presbytère, l’administration communale faisait exécuter les travaux de construction sans attendre les autorisations des autorités supérieures. Avec l’achèvement du presbytère, où Pierre Thinnes, le vicaire de l’époque, avait emménagé le premier avril 1897, le dernier obstacle sur la voie de la création d’une paroisse de Bonnevoie indépendante avait été surmonté et les efforts consentis en 1896 et 1897 pour atteindre ce but, pouvaient se poursuivre de façon décidée.
Dès sa séance du 25 janvier 1896, le conseil communal de Hollerich avait décidé d’adresser une requête au gouvernement avec la recommandation de donner une suite favorable à l’exigence de la population de Bonnevoie et de transformer dans un avenir proche la filiale de Bonnevoie en paroisse indépendante. Le 16 février 1896, le Ministre d’État transmettait cette demande aux autorités ecclésiastiques. Dans sa prise de position du 16 décembre, l’évêque donnait son accord formel à la création de la paroisse de Bonnevoie à la condition, qu’en dehors du traitement pour le curé de la nouvelle paroisse, on accorde aussi le traitement au vicaire établi à Bonnevoie. Le 19 décembre 1896, le Conseil de la fabrique d’église de Hollerich donnait également son assentiment. Dans le respect de la réglementation en vigueur, le conseil communal de Hollerich donnait à son tour son accord, dans sa séance du 19 janvier 1897, de transformer la filiale de Bonnevoie en paroisse indépendante.
Le 21 janvier 1897, cinq députés déposaient à la Chambre des députés une motion exhortant le gouvernement à élaborer sans tarder un projet de loi relatif au développement de la nouvelle paroisse de Bonnevoie. D’une part, on insistait sur l’urgence de l’affaire. Ainsi, on soulevait que « Bonnevoie compte selon le dernier recensement une population d’environ 2600 habitants, et il y a huit écoles avec 400 élèves. D’autre part, la construction de la nouvelle église est désormais achevée et à partir du 1er avril 1897 un vicaire s’installera au nouveau presbytère. Vu son développement industriel et économique effréné, allant de pair avec une augmentation effréné de la population, la localité de Bonnevoie se trouvera dans trois ans déjà au seuil de 3000 habitants ». Vu l’urgence, Paul Eyschen, à l’époque Ministre d’État, sollicitait dans sa dépêche du 27 janvier un avis rapide du Conseil d’État. Seulement trois jours plus tard, le 30 janvier 1897, la Haute Autorité constatait dans sa prise de position, que le développement effréné du nombre d’habitants de la localité de Bonnevoie justifiait une dérogation au principe retenu dans les années 1870 de ne pas prendre en compte de nouvelles propositions relatives à la création d’une nouvelle paroisse.
Le 2 février 1897, le projet de loi concernant la création d’une paroisse à Bonnevoie a été déposé à la Chambre des Députés. Les débats ont connu une suite rapide et favorable. Dans la séance plénière du 16 mars 1897, H. Bastian, le rapporteur présentait dans les grandes lignes le projet de loi ayant pour objet la création de la paroisse de Bonnevoie, qui a été expédié sans discussion et à l’unanimité par les 36 députés présents. Le 26 mars 1897, la loi a finalement été signée par le Grand-Duc Adolphe et mise en vigueur.

Ci-après la copie de la loi en langue française

Saint Joseph était choisi comme patron de la nouvelle paroisse, Sainte Irmine, patronne de l’ancienne église abbatiale, comme patronne secondaire. Par décret grand-ducal du 26 mai 1897 suivait la reconnaissance de la paroisse par l’État et le traitement du curé était accordé avec confirmation du traitement du vicaire du moment. Le 8 septembre 1897 (fête de la naissance de Marie), l’évêque Jean Joseph Koppes rendait par décret ecclésiastique l’élévation de la filiale de Bonnevoie au rang de paroisse indépendante et séparait définitivement Bonnevoie de la paroisse de Hollerich. Le lendemain, 9 septembre 1897, l’évêque fixait de façon précise les limites de la paroisse de Bonnevoie par décret.
Le 14 septembre 1897, l’évêque nommait trois habitants de Bonnevoie comme membres du nouveau Conseil de la Fabrique d’Église. Enfin, le 2 octobre 1897, le Ministre d’État, en charge des cultes, nommait par décision ministérielle deux membres supplémentaires de la nouvelle Fabrique d’Église, qui, de ce fait, était au complet et en mesure de fonctionner. Bonnevoie était désormais constituée comme paroisse indépendante. L’évêque Koppes instaurait comme premier curé Pierre Thinnes, vicaire de longue date, qui restait à la tête de la jeune paroisse jusqu’en 1914.

Claude Wolwert (septembre 2022) - traduction Jean Claude Frisch



Sources
1) Pier Jean-Pierre : Bonneweg im Mittelalter und in der Neuzeit und seine geschichtlichen Beziehungen zu Hollerich, 1939
2) Paroisse Marie Reine de la Paix, Bonnevoie - Por Bouneweg 100 Joër Kiirch, 50 Joër Oeuvres Paroissiales, 1988
3) Fabrique d´Eglise de Bonnevoie : 100 Joër Por Bouneweg, 1897-1997
4) Michel Behm : Am 26. März 1897 wurde das Gesetz zur Errichtung der Pfarrei Bonneweg unterzeichnet in : Luxemburger Wort vom 26. März 1997
5) Archives Communales de la Ville de Luxembourg : Sitzungsberichte der früheren Gemeinde Hollerich vom 25. Januar 1896 und 19. Januar 1897
6) Compte rendu analytique de la Chambre des Députés : Session parlementaire 1896-1897


Die Errichtung der Pfarrei Bonneweg im Jahre 1897
Artikel Claude Wolwert, September 2022
PDF 230.3 ko, 3 janvier 2024
La création de la paroisse de Bonnevoie en 1897

Article Claude Wolwert, traduction Jean Claude Frisch (septembre 2022)

 
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